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Jésuites à La Réunion
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Quand le Seigneur s’invite chez toi, réponds oui sans attendre

Retrouvez l’évangile du 3 novembre 2013, 31e dimanche ordinaire (année C), l’homélie du père Christophe Kerhardy, et la prière universelle des fidèles de la Résidence du Sacré-Cœur.

Article mis en ligne le 4 novembre 2013

par Père Christophe Kerhardy sj

Retrouvez l’évangile du 3 novembre 2013, 31e dimanche ordinaire (année C), l’homélie du père Christophe Kerhardy, et la prière universelle des fidèles de la Résidence du Sacré-Cœur.

 L’homélie

Illustration :Zachée, œuvre de Niels Larsen Stevns

Avant d’entrer dans Jéricho, Jésus vient de rendre la vue à un aveugle, la nouvelle se répand, la foule en liesse se presse dans les ruelles étroites, tous veulent voir le guérisseur, certains affirment même qu’il est le Messie ! Zachée, le chef des collecteurs d’impôts, est poussé lui aussi par la curiosité, mais la foule est dense et aucun protocole n’a été prévu, les officiels et les notables de Jéricho ne seront pas assis sur une estrade au passage du cortège. Zachée est un personnage important, il possède une belle demeure, des serviteurs en nombre, il a un gros train de vie ; seulement voilà, il est petit, et il butte sur la foule qui l’empêche de voir le héros. Alors il invente un stratagème : pour apercevoir Jésus, il grimpe sur un sycomore. Qu’importe le ridicule de la situation, cela ne tue pas. On imagine facilement les regards de la foule qui se rit de lui, le trésorier payeur général perché dans un arbre, c’est amusant.

Il est donc là dans le sycomore, mais que désire-t-il ? Observer le cortège incognito, sans plus, peut être que plus ou moins consciemment, comme tout homme, il cherche un sens à sa vie, un sens plus noble que l’appât du gain qui ne lui procure finalement que mépris et réputation sulfureuse. Oui, s’il pouvait croiser un regard amical, s’il pouvait entendre une parole aimable, s’il pouvait trouver un peu d’estime et respectabilité, alors peut être serait-il capable de changer.

Au passage de Jésus, tout va basculer dans la vie de Zachée. Jésus s’arrête, lève les yeux et s’adresse au publicain : « Zachée descend vite, il faut que j’aille demeurer chez toi. » Vite, j’aime beaucoup cet appel à ne pas lambiner : quand le Seigneur s’invite chez toi, ne demande pas des délais, ne dresse pas un tas d’objections, ne dis pas que tu n’as pas le temps, que tu n’es pas digne, réponds oui, sans attendre.

Zachée ne se le fit pas redire. Lui qui était honni de tous, découvre qu’il a du prix aux yeux d’un autre, un homme de Dieu veut l’honorer et tout de suite, ça c’est nouveau pour Zachée. Dans la tête de Jésus, il y a plus qu’une visite de courtoisie, c’est une opération de salut qu’il vient accomplir et elle est sans délais et sans attente. Et pour cela Jésus est prêt à se compromettre une fois de plus. Il sait qu’en allant chez Zachée, cet ignoble collabo, ça va faire jaser dans Jéricho ! D’ailleurs les commentaires s’animent, le ton se fait désapprobateur, aucun pharisien n’aurait mis les pieds chez ce ripou. Les disciples doivent s’étonner de la conduite de leur maître, mais ils suivent religieusement, et doivent sûrement se réjouir du bon repas qui les attend.

Pour Jésus la visite chez Zachée a un sens spirituel fort, et le message est simple : la bienveillance divine peut rendre aimable ce qui est ignoble aux yeux des hommes. Cette bienveillance de Dieu, le livre de la Sagesse en avait la conviction : « Dieu aime tout ce qui existe, il n’a de répulsion pour aucune de ses œuvres car il n’aurait pas créé un être en ayant de la haine envers lui. » Cette sagesse pleine d’a priori favorable, Jésus s’en est fait une devise.

Sa bienveillance ne faiblira pas sous la pression des jugements préconçus et des ladilafé, sa bienveillance regardera tout homme plus grand que ce qu’il a pu faire, elle considérera chacun plus élevé que ses attachements désordonnés ou ses mœurs douteuses. Et si nous voulons devenir les partenaires d’une grâce surabondante, c’est cette bienveillance qu’il nous faut cultiver en Église. Sans elle, nous perdons le cœur de notre identité chrétienne.

D’ailleurs, voyez vous-même ce que produit la bienveillance : Zachée se lève de table. Le moment est solennel, quel « toast » va-t-il porter ? « Voilà, Seigneur : je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. » C’est un engagement énorme, Jésus n’a pas perdu son temps, la bienveillance qui l’a conduit chez Zachée s’est muée en bienveillance de Zachée pour les pauvres.

Jésus n’avait pas accablé le publicain de reproches et ne l’avait pas écrasé sous le poids de la culpabilité, il n’avait pas exigé contrition et pénitence, mais il avait pris le parti de la bienveillance. Et les fruits de l’Esprit sont là : Zachée, de lui-même, se débarrasse de sa richesse qui l’encombrait, ou plutôt il s’en sert pour faire du bien et réparer ses torts. Cet engagement volontaire et libre est une renaissance spirituelle. Non, Zachée ne sera plus un homme asservi par la puissance de l’argent. Hier honni de tous, aujourd’hui, il est une créature nouvelle, confirmée par Jésus : aujourd’hui le salut est venu jusqu’à toi.

Nous qui sommes réunis autour de l’autel, où le Christ se compromet pour les pécheurs, nous qui allons recevoir son corps qui vient demeurer en nous, communions avec autant de joie que Zachée et demandons au Seigneur la grâce d’être bienveillants. Désormais nous le savons, nul n’est trop loin pour Dieu, et son bonheur est de trouver en chacun une demeure où s’est introduit le salut !