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Plus facile d’ouvrir la porte... que de franchir l’abîme !

Retrouvez ici l’évangile du 22 septembre 2013, 25e dimanche ordinaire (année C), l’homélie du père Christophe Kerhardy, et la prière universelle des fidèles de la Résidence du Sacré-Cœur.

Article mis en ligne le 18 octobre 2013

par Père Christophe Kerhardy sj

Retrouvez ici l’évangile du 22 septembre 2013, 25e dimanche ordinaire (année C), l’homélie du père Christophe Kerhardy, et la prière universelle des fidèles de la Résidence du Sacré-Cœur.

 L’homélie

Les richesses ne sont pas mauvaises en soi. Comme je vous le disais la semaine dernière, quand elles participent au mieux-être de tous, quand elles sont consacrées au développement des peuples et font reculer la précarité, quand elles financent un bon modèle social, alors elles sont vertueuses. En revanche, elles deviennent viciées si on se délecte en elles sans aucun souci des autres. C’est ce que dénonce Amos dans un réquisitoire enflammé qui s’élève contre la bande de gloutons vautrés sur des lits d’ivoire tandis qu’une multitude de petites gens dépérit. Jésus reprend ce réquisitoire dans la parabole du riche et de Lazare, en espérant que la crainte de Dieu nous réveille. C’est vrai que brandir la menace de l’enfer n’est pas top, mais c’est parfois le seul moyen d’affronter le Mauvais.

Au début de la parabole, deux hommes se trouvent séparées par une porte, à la fin de la parabole, ces deux hommes sont séparés par un abîme définitif. Je pense qu’une porte est plus facile à ouvrir qu’un abîme à franchir.

Quand Jésus raconte cette histoire, il s’adresse à des riches et à des pauvres. Pour les premiers, il espère les sensibiliser tant qu’il est encore temps sur l’urgence à changer de comportements. C’est la fonction éthique de la parabole. Elle nous fait comprendre que l’égoïsme est une matière fossile qui alimente les flammes de l’enfer.

Pour les pauvres en revanche, Jésus allume une espérance formidable. Voyez comment ils ne sont pas anonymes dans le cœur de Dieu. En effet, celui qui vit comme un SDF, affamé, couvert de plaies, s’appelle Lazare, le riche lui n’a pas de nom. Pour tous les pauvres qui s’identifieront à Lazare, l’histoire que raconte Jésus est une bonne nouvelle, Dieu leur ouvrira les portes de sa maison, c’est la portée eschatologique de la parabole.

Au début donc, une porte est fermée. Le tort du riche ce ne sont pas ses richesses, ses vêtements de luxe, ses festins somptueux, c’est d’être aveugle et indifférent à la misère du pauvre qui gît à sa porte. Sa richesse, sa villa, sa table auraient pu être des moyens formidables pour consacrer un grand moment d’humanité, mais il ne pense qu’à lui, il est enfermé sur lui-même, complètement insouciant au péril de Lazare.

Ne voyez-vous pas trop de portes qui se ferment ? Beaucoup de maisons sont désormais équipées de systèmes de sécurisation, de barreaux électriques, de code digital, comme si l’autre à nos portes, pire qu’un pauvre qu’on ne voit pas, devient un ennemi potentiel que l’on surveille. Pensez-vous que les yeux des caméras postés sur nos clôtures et à nos frontières, soient les yeux de la sollicitude pour autrui ?

L’esprit de Jésus qui nous anime devrait être plutôt l’élan qui ouvre nos portes en son nom.

Le tort du riche c’est d’être enfermé et aveugle, et c’est aussi d’être sourd. Il n’a pas vu Lazare, il ne lui a jamais adressé la parole, parce qu’il n’a pas entendu Dieu. Il avait Moïse, Amos et toute la Loi et les prophètes, mais apparemment il n’a jamais ouvert ces livres. Pour lui c’est insuffisant, il en faudrait davantage et jusqu’en enfer, il dit non : « Non, père Abraham » Il est comme tous ceux qui, sourds à la Parole, réclament des signes, des miracles, des preuves. Quand on est sous l’emprise de la chair, de la bonne chère, comment voulez-vous que la Parole de Dieu vous délivre ?

La porte était fermée, le livre de vie était fermé, et finalement la table était fermée.

La table du riche déborde, et beaucoup de miettes tombent à terre. Ces miettes, je les vois comme les tas de déchets qui remplissent nos poubelles et qui finiront dans un incinérateur. Là sont les flammes d’un enfer moderne, d’une fournaise où finissent nos refus de partage et de compassion.

La porte était fermée, le livre de vie était fermé, la table était fermée, mais le Christ a tout rouvert pour le pauvre Lazare.

Un homme habité de l’Esprit a compris que tout ce qui n’était pas partagé est perdu. Cet homme c’était saint Vincent de Paul, que nous avons célébré vendredi. Monsieur Vincent, touché par l’abîme qu’il voyait se creuser entre les démunis et les possédants, au nom de Lazare, fonda les lazaristes.

Comme lui, pour discerner comment nous devons gérer les biens dont nous disposons, demandons-nous trois choses simples : ma porte est-elle ouverte, ma Bible ouvre-t-elle vraiment mon cœur et ma table ?

Fais-le et Jésus ne te reprochera nullement d’être riche, au contraire il bénira ta sollicitude pour les pauvres. Oui, soyons attentifs à tous les Lazare d’aujourd’hui, alors, un pont se dressera au-dessus de l’abime.