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Jésuites à La Réunion
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Le site des jésuites à La Réunion. La communauté de la Résidence du Sacré-Cœur, les activités de la chapelle de la Résidence et du Centre Saint-Ignace.

« Co-construisons l’arche de la fraternité »
Article mis en ligne le 27 février 2019

par Père Stéphane, sj

Le séjour du Pape François au Panama, fin janvier pour les Journées Mondiales de la Jeunesse, a certainement retenu l’attention de beaucoup. Sans doute moins son séjour à Abu Dhabi, début février, pour une rencontre interreligieuse dont la portée va marquer l’histoire de l’impact des religions dans l’existence de nos sociétés.

Au moment où celles-ci connaissent de fortes tensions et où les risques de conflits entre les nations sont inquiétants, deux autorités religieuses, catholique et musulmane, se sont donné l’accolade et se sont serré les mains pour réaffirmer ensemble que la foi est au service de la réconciliation entre les hommes.

Le geste posé et l’engagement pris par le Docteur Ahmad Al-Tayyib, Grand imam d’Al-Azhar, et par le Pape François viennent s’inscrire dans la continuité des Journées d’Assise débutées en 1986 à l’initiative deS saint Jean Paul II. Il avait éprouvé que dans un monde tourmenté les religions devaient apparaître réunies pour relever ensemble le défi de la paix. « L’esprit d’Assise » s’est ainsi répandu depuis plus de trente ans pour conjurer les forces de destruction qui agitent notre monde. Saint Jean-Paul II disait : « Aujourd’hui, plus que jamais, dans l’histoire de l’humanité, le lien intrinsèque qui existe entre une attitude authentiquement religieuse et le grand bien de la paix est devenu évident à tous ».

Remontons encore un instant en arrière pour vérifier que les gestes posés à Assise puis à Abu Dhabi réalisent l’intuition exprimée par l’Église catholique au dernier concile œcuménique Vatican II en 1963-1965. Parmi les textes conciliaires, la Déclaration sur les relations de l’Église avec les religions non chrétiennes, intitulée Nostra Ætate, fonde la démarche des papes, comme elle devrait inspirer tout croyant, car elle ne fait que rappeler la commune humanité de tous les hommes, quels qu’ils soient. Tous ont en commun un même Créateur, « Dieu, Père de tous ». Nous ne pouvons donc l’invoquer en vérité « si nous refusons de nous conduire fraternellement envers certains des hommes créés à l’image de Dieu ». La discrimination ne peut en aucune façon se conjuguer avec la foi.

En amont de toute expérience de fraternité, il y a ainsi la conscience personnelle de notre origine commune, une seule.

S’impose également la réflexion sur notre fin dernière, elle aussi unique. Et par conséquent, aucun homme n’échappe « aux énigmes cachées » de leur condition humaine : « Qu’est-ce que l’homme ? Quel est le sens et le but de la vie ? Qu’est-ce que le bien et qu’est-ce que le péché ? Quels sont l’origine et le but de la souffrance ? Quelle est la voie pour parvenir au vrai bonheur ? Qu’est-ce que la mort, le jugement et la rétribution après la mort ? Qu’est-ce efin que le mystère dernier et ineffable qui embrasse notre existence, d’où nous tirons notre origine et vers lequel nous tendons ? » (Nostra Ætate, Préambule).

Devant ces fondamentaux de l’existence humaine, toute démarche honnête ne peut être qu’empreinte d’humilité, vis-à-vis de soi-même et de toute autre personne, sans distinction. Affrontés dans la prière et une vie intérieure nourrie, ils inspirent le désir de réconciliation et de paix. C’est à cette profondeur de l’expérience humaine que le Grand imam d’Al-Azhar et le Pape François, comme d’autres avant eux, ont exprimé d’une seule voix le service que les croyants ont à remplir à l’égard de tout homme. Et pour en marquer l’urgence, le Pape François a utilisé le symbole de l’arche que Noé a construite, à la demande de Dieu, pour sauver la famille humaine et toutes les créatures : « Nous aussi aujourd’hui, au nom de Dieu, pour sauvegarder la paix, nous avons besoin d’entrer ensemble, comme une unique famille, dans une arche qui puisse sillonner les mers en tempête du monde : l’arche de la fraternité ».

Le document cosigné par ces deux grands hommes de foi demande à chaque croyant, « au nom de la fraternité humaine », d’adopter « la culture du dialogue comme chemin ; la collaboration commune comme conduite ; la connaissance réciproque comme méthode et critère ». Et de préciser que « le dialogue entre les croyants consiste à se rencontrer dans l’énorme espace des valeurs spirituelles, humaines et sociales communes, et à investir cela dans la diffusion des plus hautes vertus morales, réclamées par les religions ; il consiste aussi à éviter les discussions inutiles ». Soyons donc efficaces !

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Un p’tit mot, trois p’tits pas n°98 - mars 2019