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Jésuites à La Réunion
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Le site des jésuites à La Réunion. La communauté de la Résidence du Sacré-Cœur, les activités de la chapelle de la Résidence et du Centre Saint-Ignace.

Orienter notre marche commune

L’édito du père Stéphane sj.

Article mis en ligne le 31 octobre 2017
dernière modification le 30 novembre 2017

par Père Stéphane, sj

Égrainer le chapelet au cœur du cirque de Mafate est un rendez-vous que je ne manque pas à chaque retour d’îlet à Malheur où je me rends tous les quinze jours. Dès le franchissement du Bord Bazar à l’extrémité du plateau d’Aurère, et au moment de passer le p’tit bondieu dédié à la Vierge, j’engage la descente du rempart avec la première dizaine. Les intentions de prières s’invitent au fur et à mesure de la marche. Elles évoquent les principaux événements de la semaine écoulée. Cette relecture aide à discerner les points d’attention à garder à l’esprit, et la globalité qu’ils dessinent qui confère plus de cohérence à l’existence. Le dimanche 8 octobre, ce chapelet itinérant m’a conduit à rassembler dans une seule vision cinq points de vue différents.

Du premier promontoire, j’étais à quelques encablures de la ministre des Outre-mer qui venait de passer la nuit à La Nouvelle. Deux jours avant, elle avait lancé les ateliers mobilité et jeunesse des Assises de l’Outre-mer. Ce nouveau bazar gouvernemental vaut-il la peine d’y consacrer notre énergie ? La question est en débat, avec en mémoire les Etats généraux de l’Outre-mer de 2009. Mais quand même, et si l’occasion était à saisir « d’une démarche plus participative » selon les propos d’Annick Girardin ?

Vendredi, Madame la Ministre avait participé aussi à la clôture de la Conférence internationale sur l’adaptation au changement climatique, tenue au Moca à Saint-Denis. S’agit-il aussi d’un grand bazar sans lendemain ou d’une vraie démarche d’appropriation collective des outils pour conduire la transition écologique ? Le « tout est lié » prononcé par Annick Girardin m’a évoqué l’appel pressant du pape François à la conversion écologique. Sommes-nous prêts à revoir notre copie en matière de mode de vie ?

Le nôtre, à La Réunion, jouit aux yeux de l’extérieur du label « vivre ensemble ». L’appellation est gratifiante mais nous connaissons l’écart entre l’idéal affiché et la réalité des relations humaines entre nos communautés ethnoculturelles et religieuses. Un renforcement du sentiment d’appartenance à une communauté particulière s’opère depuis quelques années. Il tend à raccourcir dangereusement la distance qui nous sépare d’une forme de communautarisme à la réunionnaise. Y prêtons-nous suffisamment attention pour freiner cette tendance par une meilleure interconnaissance entre membres de communautés différentes ? Quel est notre degré de confiance et/ou de peur les uns vis-à-vis des autres ?

Mieux se connaître ne suffit cependant pas. Le « vivre ensemble » s’alimente d’un « faire ensemble » qui nous donne une vision commune et globale de notre société et de la place que chacun peut y occuper pour se sentir participant, impliqué dans le devenir collectif. Beaucoup de jeunes sont victimes de notre incapacité à définir cette vision commune et partagée. La déliquescence du lien social qui en résulte s’ajoute aux constats récurrents des taux d’illettrisme et de décrochage scolaire. Et elle entretient les violences urbaines et les incivilités, en particulier sur la route, et plus généralement toutes les situations de non-respect et de non-considération entre les personnes d’un même voisinage.

Alors, c’est en pensant à ma vieille maman en service de soins Alzheimer que j’ai consacré la dernière dizaine du chapelet aux rencontres qui se sont tenues fin septembre : Journée mondiale de la maladie d’Alzheimer, séminaire « Prendre soin de la personne âgée », journée éthique sur « Fin de vie et insuffisance rénale chronique terminale ». Chaque situation est un défi à relever pour sortir des personnes de l’isolement et de la précarité. Mais n’est-ce pas, tout au long de ce chapelet, le même et unique défi ? Le défi de la sauvegarde de notre maison commune pour y vivre mieux ensemble.

Père Stéphane, sj


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Un p’tit mot, trois p’tits pas n°91, octobre 2017 933.5 ko / PDF